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rêvé en fin 2017
par Ines Dobelle


Le rêve que vous allez lire plus bas ne date pas d’hier. Il est vieux de plusieurs années. Bien des nuits ont passé depuis, sans que celles-ci n’avalent ni sa croûte ni sa mie, lui conférant comme au pain un caractère intemporel. Il supplante le souvenir impermanent des autres rêves. Il est là et se présente intact de cette façon :

J’avais remporté un concours pour partir en mission sur Jupiter. À la cérémonie de remise du prix, je fus toute émue de monter sur un podium pour la première fois, ayant pris l’habitude de ne jamais rien gagner. Je portai le maillot à pois du Tour de France, on m’arrosa de champagne et de flashs. Une prouesse elliptique comme en sont capables les rêves, me propulsa directement du podium jusqu’à l’intérieur de ma navette spatiale. La traversée me sembla d’une courte durée puisque j’ajupiterris. J’observai le ciel noir et constellé à travers une paroi souple, qui s’avéra être de la toile cirée transparente. De violentes bourrasques secouèrent mon équipement, dont la facture précaire me surprit pour une telle expédition. Sur quoi étais-je encore tombée ?
Ma vision se dédoubla comme un split screen. Je pus à la fois voir de l’extérieur et d’où j’étais. J’en retins une sensation de surveillance et de surveillée. Mon point de vue du dehors me fit prendre conscience que mon vaisseau ne fut rien d’autre qu’une pauvre tente Quechua, avec à sa base six énormes ventouses cramponnées à Jupiter. La planète se révéla être une fausse orange mal foutue en papier mâché, pareille au reste du système solaire fait de carton-pâte. Tout avait l’air cheap et factice. Des déchets en apesanteur gravitaient autour de moi, des feuilles de laitues confites flottaient dans l’atmosphère, des couches défilaient sous mes yeux. Je regardai consternée cette décharge à ciel ouvert en ayant l’impression de m’être fait avoir.
Petit à petit je réalisai que je fus victime d’une grosse arnaque et furieuse pris le combiné qui me relia à la Terre, en criant folle de rage que l’espace c’est moche et dégueulasse. L’espace c’est moche et dégueulasse.